« Mon seul désir, c’est de raconter une histoire »
Deux frères rénovent une Ford T retrouvée au fond d’un étang pour réaliser un vieux rêve : traverser les Etats-Unis et rejoindre New-York. Souvent, c’est plutôt le voyage vers l’Ouest qu’on raconte et, dans Evil road, qui sort ces jours en librairie, rien ne va plus aller dans le bon sens. Un dessin vif, une histoire à tension qui n’est pas sans rappeler un grand classique du cinéma. Rencontre avec son auteur, Dominique Monféry.
Roaditude – Dominique Monfery, lorsque nous vous avons contacté pour l’interview, vous nous avez dit ne pas aimer les « bagnoles »… Pourtant, elles sont partout dans vos albums, pouvez-vous nous expliquer ?
Dominique Monfery – Il y en a surtout une. Elle a été dessinée dans la série Tin lizzie pour répondre aux envies du scénariste, elle existe dans Evil road car la genèse de ce projet était de faire une suite à la série Tin lizzie. J’avais dans l’idée de créer un nouveau cycle à la série qui aurait pu être conçu par d’autres auteurs. Le fil rouge était de démarrer une nouvelle histoire, là où se terminait la précédente. Mais l’idée n’a pas plu aux éditions Paquet – j’en ai donc fait un album original. En revanche, on peut toujours deviner les prémices de mon concept : à la fin de Rodéo junction, la voiture finit dans un lac, et Evil road commence par une voiture retrouvée dans un lac.
Evil Road sort en librairie… Faire une BD, c’est un travail énorme. Que ressentez-vous au moment où aboutit votre travail ?
Toujours beaucoup de fierté car c’est un rêve de gosse que je réalise. Mais à ma grande surprise, Evil road a été vite exécuté. J’ai du écrire le scénario en trois jours et j’ai dessiné les planches en trois où quatre mois.
Il y a une rumeur qui court dans le milieu de la BD, selon laquelle, quand vous étiez petit, vos parents vous mettaient devant une VHS de Duel de Spielberg pendant qu’ils allaient faire leurs courses. Est-ce bien vrai ?
Oui, bien sûr. J’ai encore la VHS sous mon oreiller.
Plus sérieusement, en tant qu’auteur de bande dessinée, quelles sont vos inspirations, vos influences ?
Mes inspirations sont diverses, mais elles sont réunies en un seul désir : celui de raconter une histoire. Mes influences dans le monde de la bd sont, elles aussi, variées, mais il y en a une qui sort du lot : Hermann. Je sais que ce n’est pas très visible dans mon travail ; pourtant, il ne se passe pas une semaine sans que j’ouvre un de ces albums, pour le plaisir.
Vous avez travaillé pour les Studios Disney, et l’Amérique est le terrain de votre dernier récit. Quel regard portez-vous sur ce pays ?
Ce sont surtout ses grands espaces qui m’inspirent. Je fais partie de cette génération qui, jeune, regardait les westerns américains le mardi soir à la télé.
La route vous inspire-t-elle, au-delà de l’histoire d’Evil Road, où elle joue évidemment un rôle central ?
Pas vraiment, je suis plutôt casanier. Je n’ai pas une âme de grand voyageur, à part, peut-être, dans les histoires que je dessine. Ce qui m’intéressait dans Evil road, c’était de lui donner un caractère froid, impassible. D’où l’utilisation du noir quand les héros pénètrent dans le désert.
Avez-vous une route de cœur, une route que vous aimez particulièrement ?
Celle qui mène chez mon libraire.
Quels sont vos projets d’avenir ?
J’ai plein de projets pour la bd, mais rien de concret pour l’instant. Parmi eux, une adaptation de Jack London, une autre histoire en deux tomes ciblées pour un public plus jeunes, et une autre encore dans le genre d’Evil road, qui se passerait sur la mer – eh oui, après que la VHS de Duel ait rendu l’âme, mes parents m’ont mis devant Les Dents de la mer 😉
Dominique Monféry, Evil road, éditions Paquet, Pais, 2016.
(Interview : Laurent Pittet / Crédits photo : Marc Charmey)