Routes africaines - La Nationale 1 au Niger, déroute des peuples

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l existe bel et bien une échappatoire à ciel ouvert pour ne plus subir la violence des terroristes de Boko Haram (qui signifie étymologiquement « l’éducation occidentale est un péché »). La Nationale 1, au Niger, en est la preuve ardente, avec ses 1300 kilomètres de long, et son goudron brûlant. 

Inachevée depuis les assauts du mouvement djihadiste en février 2015 dans la région de Diffa, la route fut construite récemment par une compagnie pétrolière chinoise pour faciliter les transports avec le Tchad. La Nationale 1 n’est pas un mirage, elle se dévoile lentement à travers l’étendue aride qui borde dans presque toute sa longueur la frontière entre le Niger et le Nigéria. Depuis N’guigmi jusqu’à la capitale du pays, Niamey.

En partant en 4×4 de Niamey, justement, et en suivant le tracé de la route, on ne remarque rien d’anormal, sinon le calme ahurissant de son paysage désertique. Après avoir roulé dans le vide pendant un millier de kilomètres, de trop nombreux visages surgissent derrière des habitations de fortune construites par les réfugiés provenant du Nigéria et les déplacés du pays.

Ce sont quelques centaines de milliers de personnes qui ont fui leurs villes d’origine pour échapper à l’emprise des terroristes islamistes. Et c’est sur la Nationale 1 qu’ils ont décidé d’habiter.

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Une route qui demeure une oasis asséchée
L’amas de personnes sur la Nationale a donné naissance à des parcelles de villages où bétail, volailles et nouveaux arrivants se disputent le peu d’eau qu’offrent les puits le long de la route. En 2016, une bagarre concernant le manque d’eau a même provoqué la mort de plusieurs habitants alors ravagés par la soif.

Beaucoup de réfugiés proviennent de la province du lac Tchad où ils exerçaient des métiers tels que pêcheurs ou producteurs de poivrons. Aujourd’hui, ils n’ont plus accès à leurs ressources alors que le lac est le point d’eau le plus important de cette région d’Afrique centrale car il approvisionne ses quatre pays limitrophes : le Tchad, le Cameroun, le Niger et le Nigéria. En dépit de l’avancée des armées environnantes, la région du Lac reste un terreau fertile pour les négociants de Boko Haram. C’est pourquoi la plupart de la population de la région a quitté ses abords et se retrouve à sec sur la route.

Un peu plus loin sur la carte, le fleuve Komadougou coule péniblement (lorsqu’il n’est pas complétement tari). Menacés par le groupement islamiste, les résidents de la zone fluviale ont eux aussi dû quitter ses rives pour rejoindre la Nationale avec les autres réfugiés.

Un abri sur l’asphalte
Voilà pourquoi la Route Nationale 1 est devenue un repaire pour des centaines de milliers de civils. Ironie du sort, les nouveaux occupants de la N1 se disent “en sécurité” entre autres parce que les troupes nigériennes patrouillent régulièrement le long de l’extrême-Est de la zone, à Diffa. L’armée y a d’ailleurs installé des checkpoints où les militaires se cachent pour guêter l’ennemi. Boko Haram aurait donc pris ses distances avec cette partie du pays.

Un agriculteur nigérien de s’exclamer : « Nous restons sur la route, parce qu’ici au moins, personne ne tire! Et, ici, nous osons enfin dormir… »


A lire également :
Un article du quotidien Libération : « Sur la Nationale 1, les réfugiés en quête de sécurité »
Un article du portail Sahelien.com : « Sur la route nationale 1, les réfugiés fuyant Boko Haram s’installent pour durer »
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(Texte : Valentine Jansen, Dakar, Sénégal / Crédit photo : AFP-Getty Images)